En 2015, l’industrie textile génère en France une valeur ajoutée de 5,2 milliards d’euros1. Le gisement national de Textiles, Linges et Chaussures (TLC) est estimé à 517 200 tonnes mises sur le marché en 20202. Ce chiffre est en baisse de 20 % par rapport à 2019, ce qui s’explique par le contexte de crise, qui a touché de nombreuses filières. L’industrie textile génère cependant toujours de nombreux impacts négatifs sur l’environnement. Elle est très consommatrice de ressources (à titre d’exemple, il faut l’équivalent en eau de 70 douches pour produire un t-shirt) ; et fortement polluante (la mode à l’échelle internationale représente 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre chaque année, soit davantage que les vols internationaux et le transport maritime réunis3).
Pour répondre à ces constats, depuis 2007, les TLC usagés doivent être collectés de manière séparée et les metteurs en marché ont pour obligation de soutenir financièrement la collecte, le réemploi et le traitement des déchets de la filière afin d’internaliser les impacts négatifs de leur activité. La collecte
ainsi que la valorisation des TLC usagés restent cependant partielles (moins de la moitié de la quantité mise sur le marché annuellement). En 2020, l’éco-organisme Re-fashion4 affiche la répartition suivante, issue des centres de tri avec lesquels elle conventionne.
Un premier recensement (non exhaustif) issu d’une enquête conduite à l’été 2021 montre que plus de 240 acteurs sont investis en Auvergne-Rhône-Alpes dans la collecte, le tri, le réemploi, l’upcycling ou le recyclage de textiles ; un chiffre en constante augmentation, qui démontre bien la prise en compte croissante des enjeux liés au textile. Parmi ces structures, les acteurs de l’ESS sont des acteurs clés et historiques du réemploi, de la réutilisation et du recyclage des TLC. Qu’elles soient entreprises d’insertion, ressourceries, associations caritatives ou associations de sensibilisation, ces structures contribuent à la fois à prolonger la durée de vie des produits TLC pour mieux préserver l’environnement, à rendre accessibles des vêtements à bas prix, et à renforcer l’ancrage territorial de ces activités textiles.
Depuis plusieurs années, les structures de l’ESS rencontrent cependant plusieurs difficultés, qui seront abordées dans les pages qui suivent, et qui ont conduit à la réalisation de cet état des lieux :
- La qualité des vêtements collectés régresse, ce qui réduit le potentiel de réemploi et réutilisation.
- En parallèle, les quantités collectées augmentent fortement. Les structures se retrouvent confrontées, pour un certain nombre d’entre elles, à des difficultés de stockage, qui ont été accentuées par la crise de la COVID-19 et la fermeture des frontières en 2020.
- Les soutiens financiers restent faibles, notamment de la part de l’éco-organisme, sur les opérations de collecte, de tri et de préparation de la matière, qui sont des étapes cruciales pour recycler la matière mais qui sont laborieuses et coûteuses, demandeuses de beaucoup de main d’oeuvre.
- La concurrence s’est intensifiée (notamment via les plateformes internet de revente de textiles de seconde main), ce qui impacte le modèle économique de certaines structures, basé sur la revente.
L’étude qui suit s’attachera à analyser le contexte et les évolutions récentes qui impactent le réemploi textile, les types d’activités existantes, les initiatives exemplaires, les contraintes rencontrées ainsi que des pistes de développement pour le réemploi des textiles.
1 L’industrie textile en France : une production mondialisée, sauf pour les produits de luxe et les textiles techniques, INSEE Première n°1714, 2018.
2 Rapport d’activité, Re-Fashion, 2020 : https://refashion.fr/pro/sites/default/files/rapport-etude/RE_FASHION%20RA%202020_BD.pdf
3 http://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-mode-qqf/
4 Re-Fashion, op. cit.